Information sur l'intervenant

Résumé

L’Afrique comme continent pluriculturel fait face à des transformations radicales qui posent la question de son identité dans le système-monde globalisé. Dans cette contribution, ces transformations parfois crisiques prennent la dénomination d’afromorphoses, c’est-à-dire, des mutations inédites de forme, de structure et de nature qui ne la rendent pas toujours reconnaissable. Nous articulons ses transformations à celles que connaissent les systèmes médiatiques africains que nous nommons ici médiamorphoses. Elles touchent l’économie morale et politique des conditions de travail, de la production des contenus, des trajectoires de formation des acteurs du domaine, des stratégies éditoriales, des modèles capitalistiques des entreprises mass-médiatiques, des valeurs, des représentations et imaginaires véhiculées par les émissions et programmes, etc. Ces afromorphoses sociopolitiques, culturelles, anthropologiques et leurs pendants médiatiques sont-elles de nature à rendre possible l’avènement, l’événement et l’emprise d’une nouvelle pensée africaine ? La  nouvelle pensée africaine peut-elle s’envisager sans une nouvelle civilisation africaine des médias et de la communication ? Ce sont les interrogations qui organisent cet essai. En d’autres termes, comment, entre nostalgisme des anciens, panafricanisme anachronique de quelques élités politico-médiatiques, conspirationnisme et présentisme des digital natives, une nouvelle pensée africaine peut émerger et cohabiter avec les autres dans un sysème-monde de ruissellement, d’entrelacs mais où l’impérialisme culturel et médiatique demeure de mise ? Derrière ces énoncés, il s’agit d’une démarche réflexive qui analyse de manière spectrale, les ressorts actuels de la culture médiatique et des formes de communication qui ont cours sur le continent pour voir si elles sont de nature à influencer la diffusion et la circulation d’une nouvelle pensée africaine quand celle-ci est envisageable. Nous avançons l’hypothèse selon laquelle, la complexité et la post-modernité africaine dont la nouvelle pensée se veut le manifeste ne peuvent se saisir qu’en questionnant entre autre, notre culture de la communication, notre rapport à la communication, aux médias comme dispositifs sociotechniques idéologiques produisant et véhiculant des contenus à partir de paradigmes partagés entre acteurs de tous ordres interagissant dans ces mondes. Les réinventions, les reconfigurations de la pensée africaine appellent une poétique nouvelle des rapports aux supports médiatiques, aux pratiques communicationnelles, aux imaginaires qui accompagnent leurs usages. En interrogeant dans le même mouvement les imaginaires et les discours d’escorte qui véhiculent et constituent la conception que se font les sociétés africaines de la culture médiatique, ses modes d’action, ses effets et ses enjeux, c’est tout le gouvernement des systèmes de communication du continent qui est mis en demeure de s’adapter aux défis géostratégiques de ce domaine aux plans politique, économique, socioculturel.